Gabriel: Bonjour Walter.
Walter: Bonjour Gabriel.
G: Comment va ta femme ?
W: Arrête tout de suite tes mondanités et allons droit au but: tu veux encore de l’argent ?
G: Oui, je suis sur un gros projet et je suis raide de chez raide.
W: Comme d’habitude, quoi ?
G: Heu oui, comme d’habitude …
W: Tu sais bien que je ne peux plus te prêter de l’argent, cela devient beaucoup top risqué au vue de tout ce que tu me dois déjà.
G: Oui, mais là, c’est fort différent; je t’apporte de solides garanties.
W: Gabriel, tu ne peux pas éviter les ennuis en dépensant plus que ce que tu gagnes.
G: Mais c’est différent, te dis-je ! J’ai des garanties.
W: Je suis tout ouïe.
G: Je voudrais terminer la construction de l’immeuble du Marais.
W: Aie !
G: Gonzague est de la partie.
W: Ce malheureux Gonzague ! Ne crois-tu pas que tu ne l’as pas assez pressé comme cela ?
G: Cette question est hors de propos; je lui ai déjà évoqué notre affaire et il est d’accord, emballé même.
W: Et où sont ces fameuses garanties ?
G: Il finance à hauteur de 75%.
W: Je vois, donc tu prends 25% ?
G: Oui, sur 8 ans.
W: Et les locataires ?
G: Comme d’habitude, tu me connais ?
W: Que trop ! Pourquoi fais-tu cela ? Tu crois vraiment que c’est ton rôle ?
G: Cela me regarde.
W: Et si tes locataires ne paient pas ?
G: Ils prennent une assurance obligatoire à la CFA.
W: Gros malin, la CFA t’appartient. Et elle est déjà lourdement endettée !
G: Ce n’est pas grave, je peux toujours compter sur les revenus de l’AFC.
W: L’AFC, qui comme par hasard t’appartient également ! Tu sais très bien que tu joues avec le feu !
G: Ce n’est pas tes histoires: je ne t’ai jamais sollicité pour l’AFC alors tu la laisses en dehors de tout cela.
W: Il n’empêche que tout cela ne sent pas bon du tout.
G: Alors, tu me suis ou pas ?
W: Je ne sais pas trop, il me faudrait plus de garanties.
G: Tu sais très bien que je n’ai aucun mal à lever les cotisations pour la CFA et l’AFC, ce qui me procure du récurrent.
W: Oui, je le sais bien et j’ai bien vu que ton service de contentieux ne faisait pas dans la dentelle.
G: Tu sais aussi que mes participations dans des grosses boites comme FDE me garantissent de solides dividendes tous les ans.
W: Certes, mais pour combien de temps encore ?
G: Et le top du top: le mécanisme de bail-in que j’ai discrètement imposé aux sociétaires de la CFA et de l’AFC.
W: Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
G: Je t’explique: tous les mois, mes sociétaires cotisent et bien entendu lors d’un sinistre (accident ou défaut de paiement d’un locataire), ils sont remboursés en fonction de ce dont ils ont souscrit. Ce remboursement est toutefois plafonné à hauteur de 75% de la valeur totale du sinistre. S’ils souhaitent être remboursés à hauteur de 100%, alors ils prennent une assurance complémentaire. La chose amusante, c’est que les sociétaires du CFA vont dans ce cas voir l’AFC pour leur complémentaire, et chose encore plus amusante, ceux de l’AFC vont chez le CFA; mes services commerciaux sont redoutablement efficaces.
W: En effet !
G: Exact, mais ce n’est pas tout: sur le reliquat qui représente 25% des sommes, j’ai mis une clause en petits caractères qui dit qu’en cas de difficulté de la société, l’assurance peut saisir la totalité de ce reliquat pour se couvrir.
W: C’est diabolique, mais les gens ne disent rien ? Parce que c’est quand même drôlement gonflé !
G: As-tu déjà lu les 32 pages de ton contrat d’assurance ?
W: Non, car c’est écrit trop petit et aussi c’est surtout indigeste.
G: Tu vois. Alors on fait affaire, oui ou non ?
W: Vu la dette que tu as chez moi, j’aurais tendance à dire non, mais je dois bien avouer que tes trois derniers arguments font mouche, l’Ange.
G: Je t’ai déjà dit que je détestais que l’on m’appelle comme cela ! Alors, c’est ok ou pas ?
W: C’est ok, même si cela me déplait beaucoup. Une chose encore.
G: Oui ?
W: Un jour où l’autre, tu sais très bien que tu devras passer à la caisse.